Emmanuelle_mini
Patricia peine à refermer le haut de son chemisier : ses doigts tremblent, elle triture maladroitement la nacre du bouton, peine à reprendre le contrôle de son corps. Caroline, accroupie devant elle, ramasse les papiers éparpillés à ses pieds. La supérieure peste.

Surtout ne la faites pas jurer, vous toucheriez à un registre qu’on n’admettrait pas chez quelqu’un de si haut placé.

« Ce bouton, décidément ! »
Caroline lève les yeux.

Saviez-vous qu’ils sont verts, saviez-vous que le droit, surtout, a de petits éclats jaunes tout autour de la pupille, et voyez comme ils brillent à cet instant précis !

Caroline se redresse. Épaules relevées, dos droit, fesse ronde, poitrine éloquente sans provocation

…et le menton bien haut pour couronner le tout, vous savez comme j’y tiens.

Patricia en lâche son bouton : elle ne reconnaît pas dans cette femme presque arrogante la demoiselle falote qui lui tape son courrier. Les mains de Caroline avancent, ses doigts, fins et habiles, prennent gentiment le relais, s’emparent du bouton récalcitrant, font leur office sans hâte et sans complexe. Efficaces et précis. Madame la Directrice se laisse faire sans un mot, on voit bien qu’elle n’a pas l’habitude d’être ainsi prise en main.

Et c’est tout ?…vous auriez pu laisser l’index de Caroline s’attarder un instant sur la peau de Patricia : celle du cou a l’air tendre et si triste. Vous souriez comme un enfant, prétendez en avoir assez fait. Je ne vous savais pas si sobre et si soudain.

Caroline tourne les talons. « De toute façon, je préfère les hommes ! »

Je ne vois pas ce que cette réplique vient faire ici. Sans doute ai-je un peu lourdement insisté, vous êtes trop bien entré dans mon jeu et dans ce personnage. Ne restez pas sibyllin, dévoilez peu à peu son mode de pensée, ses méandres, sa vie… Trépanez, je vous dis !

Reprise en main

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