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¿ Les 7 mains ¿
31 mars 2009

Des nouvelles frappantes

Bertrand_mini
C
et aveu me coûte beaucoup, croyez le bien, mais les flics avaient raison. J’en suis perplexe et morose.
Ces ronds dans la Vistule ont cependant bien failli coûter des ronds à mon pécule et je ne tenterai plus l’expérience. Je ne chercherai plus à prouver à tout prix la vérité de ce que j’écris sur Les sept mains… D’autant que certain commentateur indélicat…
Chuttt… On se calme… On se calme…
Sur le pont Poniatowski, donc, je me suis arrêté. J’avais laissé ma voiture un peu plus loin, à l’entrée et au pied de la statue du général de Gaulle. Oui, de Gaulle, d’un pas martial que lui auraient
assurément envié les meilleures légions romaines de l’Empire à son apogée, orne une petite place des bords de la Vistule.
Qu’est-ce qu’il fout là, de Gaulle, hein ? que vous vous demandez sans doute…C’est qu’il était venu aider les Polonais à guerroyer victorieusement contre les troupes de Lénine, en 1920. Une histoire de frontière que le rusé Lénine, après s’être fait rouler comme un bleu à Brest-Litovsk, ne voulait plus reconnaître… Il n’était encore que capitaine, de Gaulle. Mais la statue polonaise a quand même voulu l’immortaliser avec la stature d’un général…Bref, tout ça, ça n’a pas grand chose à voir avec les ronds dans l’eau du pont Poniatowski. C’est juste pour dire que le fondateur de la 5ème République française encombre, pardon, orne, une place de la 3ème République de Pologne et que, moi, personnellement, si j’étais… Mais, bon, bon, aux ronds, aux ronds !
Donc, j’arrive à desceller en suant sang et eau un de ces foutus pavés carrés et je le balance dans le fleuve. Un rond énorme, de plus en plus énorme, qui s’est élargi, élargi et qui est enfin venu mourir en clapotis sur les bords de la Vistule, que ça a fait. Ben merde alors, que je me suis dit ! C’est de la sorcellerie ! Tu m’étonnes que les deux flics communistes, matérialistes comme ils étaient,  ont dû être estomaqués…Des nigauds, qu’il dit  Stanislaw ! Il en a de bonnes, lui ! J’voudrais l’y voir ! Faudra que je l’emmène constater ça un jour… Et je m’apprête à reconduire l’expérience étonnante, je souffre derechef à vouloir arracher un deuxième pavé quand retentit derrière moi un coup de sifflet rageur et que j’entends hurler :
- Prosze Pana co sie dzieje ? Co Pan robi tutaj ? (S’il vous plaît, Monsieur, que se passe t-il ? Que  faites-vous là ?)
Je n’ai pas tout compris du mot à mot,  mais j’ai quand même compris que les deux uniformes qui me fonçaient droit dessus voulaient que je leur explique ce que je fabriquais exactement là, à arracher les pavés de la voie publique. Tous les flics du monde - mis à part les deux originaux de Stanisław - savent qu’il y a toujours dans ce geste comme une sorte de gendarmophobie latente ou, quand ça chauffe vraiment, carrément manifeste.
J’ai donc bredouillé en anglais que j’écrivais des textes sur un blog français, Les seven hands, que j’ai dit, et les deux pandores ont froncé le sourcil, me tenant en arrêt sous leurs gros yeux inquisiteurs. Ils ont fini par comprendre que j’étais Français et qu’il ne fallait dès lors pas chercher à comprendre. Ils  m’ont gentiment dit de déguerpir et hop, me vl’a parti en courant vers ma voiture, au pied du général de Gaulle.
Oui, le général de Gaulle, d’un pas martial que lui auraient assurément envié les légions… Ah, zut, ça j’ai déjà dit plus haut…
Je me suis éclipsé vers le centre de la Ville. Si vous ne connaissez pas, venez un  jour flâner à Stare Miasto, la vieille ville. C’est rose comme à Toulouse, c’est beau comme nulle part ailleurs et il y a là autant de mélancolie romantique qui flotte dans l’air que de désabusement sympathique et de désinvolture de bon aloi. Les vieux remparts, si chers  au cul de Madame Brel, ceinturent Stare Miasto sur l'un de ses côtés et surplombent les faubourgs de Varsovie, la belle, la martyre, l’éternelle Varsovie.
Un thé ! que j’ai commandé dans un petit bistro feutré, pour me remettre de mes émotions d’avec ces deux flics et de ces ronds bizarres faits dans l’eau  par des pavés carrés ! J’ai allumé une Chesterfield et j’ai pris le journal…
J’aime être anonyme dans cette grande ville étrangère. Je n’existe pas, je ne suis pas là, les gens ne me parlent pas, ne me voient pas, je suis dilué, face à moi-même, face à mon destin d’exilé et mes ailes  qui ne sont pas de géant ne m’empêchent nullement de marcher au milieu des huées… Je ne me fais jamais remarquer et…
Je me suis esclaffé très fort en me renversant très loin en arrière sur ma chaise, si loin que mes genoux ont chahuté la table, que le cendrier à terre s’est brisé avec force fracas et que mon thé a fait la culbute, maculant affreusement le beau tapis… Les gens se sont retournés, certains ont haussé les épaules, d’autres ont souri, d’autres se sont levés pour m’aider à réparer le désastre, la patronne est accourue, aussitôt suivie du garçon de café empressé et gazouillant des trucs.  Bref, l’émeute...
C’est que je venais de lire le compte rendu d’un jugement d’assises… Si, si, j’arrive à déchiffrer en lisant lentement et en suivant du doigt les amoncellements de consonnes qui forment des syllabes, puis des mots, puis des lignes, puis enfin un petit texte.
Ça racontait  un gars de la campagne, au nord, vers la Baltique, qui avait tué l’amant de sa femme. Son voisin, en plus, le fourbe de lubrique ! Le gars les avait guettés, puis pris en flagrant délit dans son lit en train de jouer gaillardement le jeu de la bête à deux dos, de souffler comme des phoques et de s’ébrouer comme des  pourceaux… Il avait préalablement dissimulé un puissant arrache-clou dans un journal avec lequel il avait frappé son rival par derrière, sur la nuque, cependant qu’il besognait sa légitime par derrière, oui, sur la nuque, Monsieur le Président, qu’il l’avait frappé. (Je me demande si je n’ai pas oublié un point ou une virgule quelque part, moi…)
-    Avec quoi avez-vous donc  frappé ? que le Président de la cour lui avait  demandé.
-    Avec le journal, avait répondu le mari bafoué.
-     Et qu’est-ce qu’il y avait dans ce journal ?
-    Je ne sais pas, votre Honneur. Je ne l’ai pas lu…

Et moi, à cause de ce foutu cocu assassin, de ces deux journaux, celui qui a tué et celui que j’ai lu, jamais plus je ne serai anonyme et peinard dans un petit bistro feutré de Stare Miasto.

7_vert

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Commentaires
M
Mais oui bien sûr, nous sommes d'accord sur les choses.<br /> <br /> Et cela me rappelle une maxime, une "considération non intempestive" sur "l'Exil des mots", qui disait à peu près ceci :<br /> <br /> Et abonder dans leur sens satisfait toujours mes amis, mes ennemis aussi.
B
Je ne connais point de choses qui soient belles sans être un tantinet sublimées...<br /> J'ai dit "choses", hein ?
M
... et donc un peu trop sublimée peut-être ?
B
Elle est à l'ouest, à 200 Km à l'ouest...Mais pour atteindre Puchowa gora, qu'est-ce que 200 Km ?<br /> J'en connais qui traverseraient le désert à pied pour contempler cette montagne sublimée!
M
...et l'histoire qu'on se rappelle.<br /> Dites-moi, main du mardi, la route pour Stare Miasto, est-elle à l'ouest de celle qui va de Kolano à Puchowa Gora ?
¿ Les 7 mains ¿
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