Courriel à l'attention de M. Redonnet
De : Géraldine Bouvier
Objet : Votre texte du 10 courant
Date : 10 mars 2009 09 :15 :00 HNEC
A : Bertrand Redonnet
Cher Bertrand,
Vous m’excuserez de prendre quelques libertés avec la règle, tacite, des 7 mains, selon laquelle nul ne doit s’immiscer dans les domaines respectifs des uns et des autres. La chose vaut d’ailleurs plus spécialement pour moi encore, qui ne suis rien ici, à part l’éditrice (contrariée, comme vous le savez) de Marc Villemain.
Si je m’autorise cette licence, toutefois, c’est en raison du désarroi qui a suivi ma lecture, ce matin, de votre texte intitulé Poissonnier. Autant vous dire les choses franchement, cher Bertrand : non seulement c’est un peu court, mais c’est absolument inepte. Je crains que vous ne tombiez peu à peu dans le même travers que Villemain, qui l’autorise à suivre complaisamment ses humeurs et à ne rechercher que son seul plaisir, sans considération aucune pour les lecteurs.
Je suis ce blog avec infiniment d’attention, vous vous en doutez. Depuis qu’il existe, je peux bien vous l’avouer, j’ai délaissé ma lecture quotidienne de LIBERATION pour prendre mon petit déjeuner avec vous sept. Vos textes, s’ils n’entrent pas exactement dans le genre de littérature que j’affectionne, me font pourtant sourire et rire avec constance. J’y admire, même, cette gouaille un peu populo qui n’est pas sans m’évoquer une certaine littérature française des années d’avant-guerre. Mais, là, cher Bertrand, à trop vouloir faire rire le chaland à moindre frais, vous avez commis une sorte d’impair. Vos blagues de comptoir ne sont bonnes que lorsqu’elles sont dédiées à la littérature. Si c’est pour rapporter celles que je peux entendre au zinc en bas de chez moi, alors pourquoi vous lirais-je encore ?
Un accident peut arriver à tout le monde, nous avons tous nos faiblesses. Mais j’apprécierais hautement que vous nous fassiez oublier cet écart et que vous nous polissiez une vraie petite perle. Croyez-vous cela possible ? Et serait-ce trop vous demander ?
Sentiments très cordiaux,
Géraldine Bouvier